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Arts du monde

Au top ten des enchères, les arts premiers ne sont pas les derniers. Qu’on les appelle art du monde, arts tribal ou arts tribaux, ces trésors d’Arts d'Afrique, d'Amérique et d'Océanie vendus aux enchères ont fasciné les collectionneurs d’André Breton à Pablo Picasso, de Pierre Vérité à Jacques Kerchache, lequel a contribué à faire entrer au Louvre en 2000 les productions de ces peuples jugés « sans écriture et sans histoire » en préfiguration de l’ouverture du musée du Quai Branly à Paris.
« Les chefs-d’œuvre du monde entier naissent libres et égaux », disait cet amateur au sujet de ces objets magiques venus des quatre coins du globe : d’Afrique (Côte d'ivoire, République du Congo, République démocratique du Congo, Nigeria, Angola, Burkina-Faso, Gabon, Madagascar …), d’Océanie (Papouasie Nouvelle-Guinée, Îles Marquise, Îles Cook, Îles Salomon, Nouvelle-Zélande, Polynésie …) des Amériques (Taïnos des Iles Caraïbes, Inuits du golfe de l’Alaska) et d’Insulinde (Bornéo, Indonésie …).
S’ils ont acquis tardivement le rang d’œuvres d’art, les arts premiers provoquent depuis 2000 le feu (sacré) des enchères en ligne, qu’il s’agisse de masques Dogon, de statues Fang ou de figures de reliquaires Mbulu Ngulu Kota ; de pendentifs Maori ou de sculptures Eskimo…
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Lots recommandés

Un mortier conopa représentant un alpaca, pour la préparation de la chaux ou des cendres à destination de la mastication de la coca. Le lama et l’alpaca ont été depuis longtemps domestiqués dans les hauts plateaux et vallées andines (sauf la vigogne et le guanaco restés sauvages), notamment pour leur laine essentielle à la vie dans les hauts plateaux, mais aussi fondamentale à l’économie dans les cultures préhispaniques au Pérou. Ce type de mortier en pierre en forme de lama ou d’alpaca est souvent décrit dans la littérature comme un conopa, mais ce terme décrit en fait des petites sculptures en pierre illustrant la vie quotidienne des incas. Ce type de mortier était assez repandu à l’époque, et celui de la collection Jean Roudillon en est un des plus beaux exemplaires, et constitue un classique de l’art Inca. On notera sous sa base de belles traces profondes de découpes anciennes témoignages des pratiques de son propriétaire à l’époque inca, qui n’enlèvent rien, au contraire, à la beauté de l’objet. Culture, Inca, 1450 à 1533 après J.-C., région de Cuzco, Pérou Pierre noire, anciennes entailles sous la base, usures et petits accidents anciens mineurs, importants reliquats de cendres ou chaux à l’intérieur du mortier, très belle et ancienne patine d’usage H. : 8,2cm. et L. : 13,6 cm Voir pour un autre mortier comparable p. 121 n° 352 dans Ancien Pérou Vie Pouvoir et Mort, musée de L’Homme, Ed. Nathan 1987, ou deux autres très beaux exemplaires dont un très proche n° 38 dans : Peru Sun Gods and Saints, catalogue d’exposition, André Emmerich, New York 1969 Provenance : Collection Jean Roudillon

Estim. 800 - 1 000 EUR

Une spatule à chaux du Maître de la projection orale. Harry Beran, le grand spécialiste de l’art de la région Massim, dans son ouvrage Mutuaga a identifié dix spatules à chaux et huit mortiers à noix de bétel de cet atelier dit du maître(s) de la projection orale, qui compte sans aucun doute plusieurs sculpteurs. La spatule à chaux de la collection Jean Roudillon, collectée par le Comte Festetics de Tolna, est incontestablement au sommet de la chaîne de création de ces œuvres si on les compare, et sans aucun doute de la main du maître. Ainsi qu’Harry Beran l’a constaté et l’écrit, sur les plus beaux exemplaires du corpus la saillie qui rejoint le buste sort clairement de la bouche, alors que sur d’autres exemplaires elle apparaît à l’arrière de la bouche au niveau du menton. Il est tentant d’interpréter cette saillie comme une langue, mais d’après un informateur kitava il pourrait s’agir du mucus qui sort de la bouche et du nez d’un magicien au moment de sa mort. Il est intéressant de constater que c’est aussi au niveau de la bouche qu’apparait cette saillie, créant une boucle avec le buste, sur un très beau mortier collecté aussi par Le Comte Festectics de Tolna, et déposé par lui dans les collections du musée d’ethnographie de Budapest (musée Neprajzi) avec mille six cents autres objets acquis lors de ce même voyage légendaire. La spatule de la collection Jean Roudillon représente un sujet féminin, sa sculpture est superbement équilibrée, détaillée et précise, comme les doigts entrecroisés des mains reposant sur le ventre entre l’ombilic et le sexe, ou les oreilles sculptées en haut relief en volutes harmonieuses. Le visage est orné de motifs gravés à trois pointes, encore emplis de chaux et caractéristiques du corpus, placés sous chacun des yeux gravés en cercles, ainsi que pour l’ombilic tel un troisième œil. Les motifs gravés concentriques qui s’enroulent autour de l’aréole des seins créent un autre regard, halluciné, ou animal caché, et se retrouvent transposés de la même manière à l’arrière au niveau des omoplates. Dans le bas du dos ondule un autre motif gravé en ligne d’eau. Les volumes de la sculpture sont impressionnants, son expression est aussi sereine qu’extatique, ses proportions sont incomparables à la majeure partie du corpus, comme l’est aussi sa patine, exceptionnelle, laquée et recouverte de résidus de plaques de suie. Chef-d’œuvre parmi les chefs-d’œuvre, hypnotique, publié dans Le Musée Vivant, il s’agit sans aucun doute de l’un des joyaux de la collection Jean Roudillon. Massim, Îles Trobriands, Papouasie Nouvelle Guinée, XIXe siècle Bois dur (ébène), pigment, usure et petit manque visible au bras gauche (casse ancienne) sublime et ancienne patine d’usage laquée avec des dépôts de fumée, soclé par Inagaki en 1942 ou 1943 (socle non signé). H. : 28 cm Voir p. 199 dans Mutuaga A Nineteeth-Century New Guinea Master Carver, Harry Beran, Ed. The University of Wollongong Press 1996 Voir pour un mortier collecté par Festetics dans les collections du musée d’ethnographie de Budapest n° 26 du catalogue de l’exposition Massim, The Museum of Primitive Art, New York 1975. Voir : L’art Océanien - Sa présence – N° 38 de la Collection « Le Musée Vivant », présentée par Madeleine Rousseau, introduction de Paul Rivet et des textes de Guillaume Apollinaire et Tristan Tzara, APAM (Association Populaire des Amis du Musée) 1951, reproduit p. 76 fig. 131. Provenance : - Collection du Comte Rodolphe Festetics de Tolna, collectée par lui avant 1896 - Collection du Dr Stéphen Chauvet (acquis aux enchères caisses fermées, sans inventaires) - Collection Galerie Le Corneur Roudillon - Collection Jean Roudillon Publications : - Le Musée Vivant-L’art Océanien sa présence n° 38 de la Collection Le Musée Vivant , APAM (Association Populaire des Amis du Musée) 1951, reproduit p. 76 fig. 131. - Tribal Art-Le Monde de l’Art Tribal N° 4 décembre 1994, Spatules à chaux de la région Massim P. Bourgoin, p. 36 fig. 2. - Tribal Art-Le Monde de l’Art Tribal N° 4 Hiver 2003, Dossier « À la rencontre des collectionneurs », Jean Roudillon : l’histoire de l’œil jusque dans ses murs, PH. : Pataud Célérier, p. 88. Exposition : - « Art du Pacifique » Indonésie – Océanie, Galerie Le Corneur Roudillon, 51 rue Bonaparte à Paris, du 24 janvier au 15 février 1951. - L’Aristocrate et ses Cannibales Le voyage en Océanie du Comte Festetics de Tolna (1893-1896) au musée du Quai Branly, du 23 octobre 2007 au 13 janvier 2008.

Estim. 40 000 - 60 000 EUR

Un cimier de danse Ci-Wara représentant une antilope et un fourmilier. Nous ne nous attarderons pas trop ici sur les aspects traditionnels qui entourent ces fameuses sculptures, cimiers de danse Ci-Wara, le culte du Jo, et la société secrète du même nom écrite aussi Tyi-Wara. La société Tyi-Wara est une des sociétés intermédiaires après l’initiation, société d’ailleurs plus ouverte et inclusive que les autres sociétés secrètes, intégrant les femmes, et autorisant aussi les enfants à s’en approcher, notamment du fait que la société Tyi-Wara traite essentiellement d’agriculture et que les travaux agraires sont aussi en grande partie réalisés par les femmes. C’est le génie créatif particulier d’un artiste qui retient ici toute notre attention et qu’il faut admirer, comme il avait retenu l’intérêt de Jean Roudillon et de conserver cette œuvre rare en particulier. C’est dans l’ancienne collection de Gaston De Havenon, bien connu pour son goût et sa collection de cimiers Ci-Wara, que l’on retrouve le seul autre cimier Ci-Wara de la même main (ou atelier), publié de nombreuses fois depuis, et qui soit comparable à celui-ci. Cette œuvre avait évidemment retenu l’attention d’un autre grand amateur et sachant, attaché à jamais à l’histoire des connaissances du monde bambara, et à l’origine d’une étude comparative unique de ces sculptures extraordinaires que sont les cimers Ci-Wara, en la personne de Dominique Zahan qui l’avait identifié sous le dessin référencé IM133 dans son ouvrage incontournable : Antilopes Du Soleil. Les différents animaux, porteurs de nombreux symboles, qui inspirent l’artiste dans sa prouesse de sculpter un cimier Ci-Wara, sont ici probablement plus que deux, et si le cimier Ci-Wara anciennement dans la collection Gaston De Havenon est décrit dans un ouvrage comme une antilope (hippotrague noire) et un fourmilier, les cornes du cimier Ci-Wara de la Collection Jean Roudillon, tendues comme des épées, sont plus probablement celles de l’oryx, ayant depuis des décennies disparues du Mali. Bambara, Mali Bois, manques visibles, accidents et restaurations aux cornes (cassées collées) pièces d’origine et restauration d’une boucle (en partie), belle et ancienne patine d’usage. H. : 63 cm Voir pour l’autre cimier Tyi-wara anciennement dans la collection G. De Havenon dans : Antilopes Du Soleil, Arts et Rites Agraires d’Afrique Noire, Dominique Zahan, Ed. A. Schendl, Wien 1980 réf. IM 133 planche 39, et p. 217 n° 201 dans : Bamana The Art of Existence in Mali, Jean Paul Colleyn, Ed. Museum for African Art NY 2001. Provenance : Collection Jean Roudillon

Estim. 8 000 - 12 000 EUR

Une statuette féminine d’un atelier de Bombou-toro Portant un labret à l’aplomb de son visage hyperstylisé, et une coiffure formant une crète en une natte tressée tombant à l’arrière, le regard et la présence de cette statuette dogon d’une géniale modernité ne font aucun doute. S’inscrivant dans les styles hiératiques et très synthétiques de Bombou-toro, cette ancienne sculpture dogon inédite, provenant de l’ancienne collection de René Rasmussen, vient compléter un corpus de statuettes rares d’un atelier ayant initié un style aux spécificités très caractéristiques. La plus extraordinaire de ce corpus est sans aucun doute la maternité de l’ancienne collection de Charles B. Benenson offerte par lui au musée de l’Université de Yale. Les genoux sculptés en cylindre font notamment partie des détails parmi les plus emblématiques de cet atelier. D’après Hélène Leloup ces protubérances au niveau des genoux renvoient au mythe fondateur, « les premières créatures humaines avaient des membres sans articulations et elles se sont formées lorsque le forgeron, en descendant du ciel, a eu les bras et les jambes cassés par l’enclume, ce qui a permis aux hommes de travailler », et symbolisent les pierres magiques duge. « Les duges sont placées sur les articulations car c’est le plus important de l’homme. » (Griaule). Comparée à la statuette de la collection C. Benenson, on retrouve au-delà de la même position presque « robotique » ou « cubiste » avec l’angle du coude insistant encore sur l’articulation, et les bras repliés vers l’avant, ainsi que le nez sculpté en flèche, une stylisation des pieds (et l’articulation de la cheville) en triangle qui recouvrent tout le côté du socle. Le traitement des omoplates est comparable et insiste encore sur l’importance des articulations principales, aucun doute qu’il s’agit bien ici d’un art narratif. Aussi, vu de profil on retrouve la même souplesse dans le traitement des jambes et du fessier des statuettes de la collection Jean Roudillon et de celle de la collection Benenson. La patine de la statuette de Jean Roudillon n’est pas suintante comme celle de la collection C. Benenson mais elle témoigne cependant d’une évidente et superbe ancienneté. Dogon, Mali Bois, très belle érosion et fentes d’ancienneté, superbe et ancienne patine d’usage. H. : 37,5 cm Voir p. 130 n° 56 pour la statuette de la collection Benenson dans Close up-Lessons in the Art of Seeing African Sculpture from an American collection and the Horstmann collection, Vogel et Thompson, Ed. The Center for African Art New York 1990 Voir pour une autre statue de bombou toro et commentaires n° 78 dans : Statuaire Dogon, Hélène Leloup, Ed. Hamez 1994 Provenance : - Collection René Rasmussen - Collection Jean Roudillon

Estim. 15 000 - 25 000 EUR

Un sifflet orné d’un charme nsiba représentant un couple enlacé sur un lit. Associé au culte Nkisi dans la région du Bas-Congo et relatif à la chasse, ces petites sculptures appelées nsiba que l’on retrouve chez les Woyo, Sundi, Kongo, Vili, Yombe, mais aussi les Bwendé ou les Lumbu, consistent en la poignée d’un sifflet aux pouvoirs protecteurs des chasseurs. Retrouvés aussi dans l’attirail du nganga, guérisseur et devin, ces objets qui pouvaient représenter une multitude de scènes ou de sujets différents (personnages debout ou accroupi, animaux, maternités, scènes d’accouplement, ou masque), avaient aussi des vertus thérapeutiques. Généralement percé d’un trou à la pointe de la corne d’antilope qui constitue le sifflet du chasseur, et qui permet de l’attacher à une cordelette qui la relie et traverse la sculpture, la corne d’antilope présente ici n’est pas nécessairement le sienne bien qu’elle soit percée mais du côté de son ouverture. Quand on regarde attentivement ce superbe nsiba Bakongo, inédit à ce jour, on ne peut que constater qu’il s’agit bien d’un art, et même conceptuel. Le couple regarde vers l’extérieur le spectateur qui les scrute, sculpté verticalement, mais le couple est bien allongé sur un lit en bois finement sculpté, donc horizontalement. Comme les rébus sur les couvercles taampha des woyo, les scènes représentées sur ces poignées de sifflet peuvent représenter des proverbes impliquant la sagesse. Concernant les scènes d’accouplement, Bertil Söderberg cite à juste titre, dans son article de référence sur les sifflets sculptés du bas-congo, ce proverbe : « bana i mbongo » les enfants sont la richesse. Woyo, Sundi ou Kongo, République Démocratique du Congo Bois, corne d’antilope, usures, deux fentes d’ancienneté mineures, petits accidents mineurs à la base, superbe patine d’usage. H. : 7,6 cm (sans la corne d’antilope) et 16 cm au total. Voir p. 35 n° 9 pour un autre sifflet dans l’ancienne collection Arman avec une scène d’accouplement assez proche mais moins détaillée, et p. 25 à 44 pour l’article entier de Bertil Söderberg traduit de l’anglais par Raoul Lehuard dans : Arts D’Afrique Noire n° 9, printemps 1974. Provenance : Collection Jean Roudillon

Estim. 4 000 - 6 000 EUR

Une coupe à pigments ornée d’une tête de crocodile et d’une tête humaine. En guise de poignée est sculptée une très belle tête de crocodile dont le dessus du crâne se prolonge dans la continuité du creuset de la coupe. Son œil droit conserve encore une incrustation de nacre. Sa sculpture est nerveuse, expressive et détaillée. À l’arrière de la coupe est sculptée une superbe tête d’homme d’un style très archaïque. Ses bras, gravés en relief et repliés sous la tête constituent un buste comme la poupe d’un bateau, et à travers lesquels au niveau du cou une perforation fait office de bélière. Une forme ovoïde en bourrelet est sculptée au-dessous constituant le socle pour stabiliser la coupe. Il s’agit d’un réel chef-d’œuvre des arts du Moyen Sépik, une œuvre « pré-contact », expression chère aux spécialistes des arts du Sépik. Cette coupe est publiée et commentée « godet à pigments » par Maurice Leenhardt dans son ouvrage Arts de l’Océanie publié en 1947. Un ouvrage publié dans la collection Arts Du Monde sous la direction de Georges de Miré dont l’œil n’est certainement pas étranger à la sélection de cette œuvre pour cette publication. Notre coupe avait déjà été exposée au musée de l’Homme lors de l’exposition Voyage de la Korrigane en Océanie entre juin et octobre 1938, on peut la voir photographiée dans une des vitrines de cette exposition en brillante compagnie, notamment avec le crochet à crâne Sawos que Jacques Kerchache avait choisi pour sa sélection originelle du Pavillon des Cessions, première version… Quel parcours pour cette coupe, ce « godet à pigment », depuis les rives du fleuve Sépik et sa collecte en 1935 par Régine et Charles van den Broek, dont les photos et la documentation de leur brève incursion sur le fleuve Sépik restent jusqu’à aujourd’hui d’après les spécialistes un témoignage irremplaçable. Il n’est pas étonnant que ce soit cet objet du voyage de la Korrigane que Jean Roudillon, son « inventeur », ait gardé le plus longtemps. Dans les notes de Jean Roudillon : « océanie, Nouvelle Guinée Récipient à peinture en bois en forme de crocodile au museau allongé, un œil incrusté de coquille marine. Cet exemplaire est exceptionnellement sculpté à l’emplacement de la queue d’une tête humaine percé à hauteur du cou permettant de suspendre le récipient. Provient du voyage de la Korrigane, D393 1660. » Probablement Iatmul ou Sawos, Moyen sépik, Papouasie-Nouvelle Guinée Bois, nacre, très légers reliquats de pigments blancs au niveau de la gueule du crocodile, belle oxydation d’ancienneté et superbe patine d’usage, objet taillé à la pierre dit « pré-contact ». Anciens numéros d’inventaires du musée de l’Homme inscrits sous la gueule du crocodile : D.39.3 / 1660, et un autre numéro inscrit en rouge sous le socle. L. : 30,5 cm Voir : p. 31 fig. 19 dans Arts de l’Océanie, Maurice Leenhardt, Collection Arts du Monde (sous la direction de Georges de Miré), Les Éditions du Chêne, 1947. Voir : p. 72 à 77 pour le calendrier du voyage dans Le Voyage de la Korrigane dans les mers du Sud, musée de l’Homme, Ed. Hazan Paris 2001 Provenance : - Collecté lors du voyage de La Korrigane (1934-1936), et certainement en octobre 1935 par Régine et Charles van den Broek lors d’une brève excursion en remontant le fleuve Sépik. - Collection Jean Roudillon Exposition et publication : - Voyage de la Korrigane en Océanie, juin à octobre 1938 musée de l’Homme, Paris - Visible en bas à gauche dans une vitrine lors de l’exposition au musée de l’Homme, photo d’Henri Tracol (voir reproduction page précédente). - Arts de l’Océanie, Maurice Leenhardt Collection Arts du Monde, Les Éditions du Chêne, 1947. Reproduit fig.19 p. 31.

Estim. 12 000 - 15 000 EUR

Une canne d’initié de la société du Poro ou un bâton d’escorte, possiblement la canne d’un chef et personnage historique en la personne du Roi Babemba. D’une plus petite taille que les grandes cannes tefalipitya qui célèbrent le sambali (le champion des cultivateurs) qui sera « récompensé » par une jeune femme non mariée au sommet de sa beauté représentée assise au sommet de ces cannes, la canne senoufo de la collection Jean Roudillon est ornée d’un personnage féminin sculpté en position debout, bien campé, telle une statue déblé. Il s’agit très certainement d’un bâton d’initié de la société du Poro, ou d’un bâton d’escorte dont l’image féminine évoque les pouvoirs surnaturels des femmes, celle des sandobele, les femmes-devins, qui perçoivent les dangers cachés et passent devant pour écarter les sorts jetés par les sorciers. Cette canne magnifique à la patine laquée est d’un grand style ancien, dont les grands bras stylisés aux épaules puissamment arquées et les oreilles sculptées en cylindre renvoient sans équivoque aux plus belles statues Déblé de l’atelier dit des maîtres de Sikasso. Elle a été exposée en 1964 dans trois musées américains lors de l’exposition itinérante Senufo Sculptures from West Africa dont Robert Goldwater, directeur du Museum of Primitive Art de New York, était l’instigateur. La provenance de cette canne, prêtée par la galerie Le Corneur Roudillon à l’époque, la rattache dans le catalogue de cette exposition au Roi Babemba, personnage historique s’il en est au Mali, ayant succédé en 1893 à son frère Tiéba Traoré, quatrième roi de Kénédougou qui avait mené le royaume à son apogée et fixé sa capitale à Sikasso, où il fit notamment construire son palais pour résister aux attaques de Samory Touré. Le roi Babemba Traoré se suicida en 1898 plutôt que d’être pris, préférant la mort à la honte, après avoir lutté contre l’armée colonisatrice. C’est forcément Olivier Le Corneur et Jean Roudillon qui ont transmis cette provenance à Robert Goldwater, une provenance qu’ils avaient acquise avec l’objet. Réelle ou non, Goldwater un homme sérieux et historien de l’art devait considérer cette provenance comme authentique pour la valider et la publier, bien qu’aucun autre document ne puisse en attester réellement. Dans les notes de Jean Roudillon : « Afrique, Côte d’Ivoire, Senufo Canne du Roi Babemba de Sikasso Rapportée par un officier français en1898. Publié fig. 135 dans « The Museum of Primitive Art » par Robert Goldwater, New York, 1964 » Sénoufo, Côte d’Ivoire Bois, fer, oxydation d’ancienneté, usures, petit accident à la pointe du sein droit et une restauration indigène en fer au bras droit, très belle et ancienne patine d’usage. H. : 113 cm Voir pour les statues-pilon déblé de l’atelier dit des maîtres de Sikasso p. 117 à 137 dans : Senoufo Massa et les statues du Poro, Burkhard Gottschalk, Ed. Verlag U. Gottschalk Düsseldorf 2006 Provenance : - Ancienne collection Galerie Le Corneur Roudillon - Collection Jean Roudillon Expositions et publication : - Senufo Sculpture from West Africa, Robert Goldwater, Ed. The Museum of Primitive Art, New York, 1964, p. 90 n° 135 - Senufo Sculpture from West Africa, 1963, exposition itinérante à : - New York, NY The Museum of Primitive Art, du 20 février au 5 mai 1963 - Chicago, IL, Art Institute of Chicago, du 12 juillet au 11 août 1963 - Baltimore, MD Baltimore Museum of Art du 17 septembre au 27 octobre 1963.

Estim. 6 000 - 8 000 EUR

Un lot réunissant deux anciens labrets. Portés exclusivement par les femmes, et insérés dans la lèvre inférieure, les labrets tels que ces deux très beaux et rares exemplaires, étaient des signes distinctifs bien visibles, contribuant à la beauté mais témoignant aussi de l’appartenance à la noblesse, du rang ou du statut de sa propriétaire. La lèvre inférieure était percée au moment des premières menstruations, et la taille des labrets évoluait en fonction des évènements ou du nombre d’enfants. La matière dans laquelle ils étaient sculptés témoignait de la richesse et contribuait au prestige de sa propriétaire et ainsi de sa famille. La forme de ces deux exemplaires, tous deux d’une magnifique ancienneté, les relie aux cultures dites de la Côte Nord-Ouest englobant les Tlingit Haïda et Tsmishian, et dont les plus beaux masques du XVIIIe siècle ou du début du XIXe siècle témoignaient encore de cette ancienne tradition. Tlingit, Haïda ou Tsmishian, ou Inupiak (Inuit), Côte Nord- Ouest, Canada ou Alaska, U.S.A. Ivoire marin et os de baleine, anciens numéros inscrits à l’encre (RG 1489 et RG 1490), micro-usures, très belle oxydation d’ancienneté, et très belles et anciennes patines d’usage. L. : 5,7 et 5,6 cm Provenance : - Collection Roland Grünewald (membre fondateur de la Société des Océanistes et ancien responsable des collections d’Océanie au musée du Trocadéro) - Collection Jean Roudillon, acquis auprès de ce dernier à Lorient vers 1977.

Estim. 800 - 1 200 EUR

Un pommeau de canne, insigne d’autorité, représentant un personnage important. Représentant un notable, dignitaire assis, ornementé, scarifié au visage, au cou et sur le corps, il tient devant lui par la taille une jeune fille, décrite tantôt dans la littérature soit comme une assistante soit une enfant. Les bras relevés et tenant un objet sur la tête, ici un coffret ou un repose-pieds évoquant la richesse et le prestige, il s’agit bien d’une assistante et aussi d’une enfant. Incarnée par une jeune fille prépubère n’étant pas encore réglée, cette « messagère spirituelle » protège ce dignitaire de la sorcellerie « par la force mystique de sa pureté » et lui ouvre le passage en introduisant la beauté dans les assemblées. Thimothy Garrard nous explique que le couvre-chef, ayant pu contribuer à la confusion et souvent décrit comme un apport occidental ainsi que le traitement des moustaches et de la barbe, est en fait un canotier en paille tressée que les Akyé fabriquaient avant l’arrivée des européens. Il s’agit donc sans aucun doute d’un très ancien chef attié, et non de la représentation d’un portugais ou d’un autre occidental, et certainement le portrait d’un éminent personnage historique ou légendaire dont la mémoire s’est fâcheusement perdue au fil des siècles de l’histoire du peuple Akyé. En effet ce pommeau de canne en ivoire, sans aucun doute le plus ancien d’une série (constituant un corpus d’une douzaine d’œuvres d’après François Neyt), dont la sculpture des différents exemplaires s’échelonne sur plusieurs siècles, est à la source de tous les autres, c’est l’« objet mère ». Ce corpus d’objets bien identifiés, sculptés dans de l’ivoire, et sa typologie si caractéristique, a retenu depuis longtemps l’attention de nombreux spécialistes et historiens de l’art. Sur les trois exemplaires exposés à la Smithsonian de Washington lors de l’exposition Treasures en 2008, datés des XVIIIe et XIXe siècle, et malgré qu’ils soient moins anciens que celui de la collection Jean Roudillon, on retiendra ceux de la collection Laura et James Ross qui constituent une paire homme et femme et viennent ainsi compléter l’information d’un couple et pas uniquement du portrait d’un ancien dignitaire dont ces pommeaux commémorent la mémoire. Il a forcément dû s’agir d’un personnage important, historique ou mythologique, pour que cet archétype serve de modèle à d’autres pommeaux de cannes sculptés sur autant de générations, et une lecture attentive du plus ancien d’entre tous nous permet de lever certains doutes et tenter de remonter le fil de l’histoire. Il n’est pas étonnant que ce pommeau de la collection Jean Roudillon provienne auparavant de la collection de Roger Bédiat, à la source de tellement de chefs-d’œuvre, la plus importante des collections anciennes des arts de la Côte d’Ivoire. Une collection dont Jean Roudillon avait d’ailleurs fait l’inventaire et l’estimation en 1962. Cette sculpture est fascinante à plus d’un titre, sublime de détails et d’ancienneté, elle ne rayonne pas que par sa beauté, elle éclaire le passé et le futur, et fait incontestablement partie des plus beaux joyaux de la collection de Jean Roudillon. Attié (Akyé), Côte d’Ivoire. XVIIIe siècle ou antérieur. Ivoire, importante dessication d’ancienneté de l’ivoire, petit manque visible à la coiffe (casse ancienne) et probable restauration d’une petite casse à l’avant du canotier, légères fentes d’ancienneté, restauration visible d’un petit manque à l’avant de la base du pommeau, sinon excellent état de conservation, superbe et ancienne patine d’usage, présenté sur un socle en pierre rouge. H. : 13,6 cm Voir p. 75, 78-79 et 81 pour trois exemplaires du même corpus dans : Treasures 2008, Sharon F. Patton Brina M. Freyer, Smithsonian – Ed. National Museum of African Art Washington 2008. Voir pour deux autres exemplaires du corpus provenant de l’ancienne collection Joseph Mueller acquis l’un et l’autre avant 1939 et 1942 p. 175 et 176 dans : Arts de la Côte d’Ivoire Tome 2, Ed. Musée Barbier-Mueller, Genève 1993. Provenance : - Collection Roger Bédiat - Collection Jean Roudillon Publications : - Art d’Afrique Noire n° 53 printemps 1985 p. 53 pour une publicité de Jean Roudillon - Tribal Art magazine n° 82, Hiver 2016 p. 43 pour une publicité de Jean Roudillon.

Estim. 30 000 - 50 000 EUR

Un ornement représentant un personnage portant une coiffe et un bâton, les yeux et les oreilles ornés de coquillages. Ce personnage, un dignitaire ou un guerrier tient ce qui est probablement un bâton de commandement, à moins qu’il ne s’agisse d’une lance ou d’une ancienne masse d’arme. Il est coiffé d’une couronne avec un ornement frontal le rattachant à la noblesse. Souvent ces coiffes, découvertes dans les tombes des rois, notables, prêtres ou autres dignitaires Mochica, étaient ornées au centre d’une tête de hibou ou de chouette ou d’une tête humaine. Cet ornement faisait à l’origine partie d’une coiffe ou d’un manteau funéraire. On notera, au-delà de sa belle patine d’oxydation d’ancienneté verdâtre de cuivre qui recouvre cet ornement, le très beau style en laminé et repoussé d’un grand art Mochica classique, notamment la main droite puissante du guerrier tenant sa lance traitée en facettes géométriques et la main gauche tout en rondeur. Culture Mochica, intermédiaire ancien 100 avant à 800 après J.-C., Pérou Cuivre (ou alliage cuivreux) repoussé, coquillages H. : 5 cm - D. : 7,5 cm Voir p. 148 à 158 pour d’autres éléments en cuivre laminés et repoussés dans Pre-Columbian Art Of South America, Alan Lapiner, Ed. Harry Abrams New York 1976. Provenance : - Ancienne collection galerie Le Corneur Roudillon, 1969 - Collection Jean Roudillon Exposition : Pérou, Trouvaille d’objets en cuivre et argent, Galerie Le Corneur Roudillon, Paris, 9 au 20 décembre 1969

Estim. 800 - 1 500 EUR

Une sculpture représentant une tête de « divinité aux crocs ». L’art lithique est dans son ensemble peu répandu dans l’ancien Pérou hormis dans la culture Tiahuanaco, dans la culture Recuay où il s’est distingué particulièrement, mais aussi à l’horizon ancien ou époque dite formative à travers la grande culture Chavin, étendue sur un très large territoire qui donna naissance à un art original, et qui influencera largement l’art des cultures qui lui succéderont, tel que celui des Mochica. Les divinités aux bouches ornées de crocs apparaissent à cette époque formative sur de nombreuses sculptures, comme des vases en pierre tendre, et malgré l’absence du métal à cette époque, aussi sur les très nombreuses têtes-tenons qui ornaient les murs des édifices religieux, comme le plus fameux d’entre eux le temple de Chavin de Huantar. La tête de divinité aux crocs de la collection Jean Roudillon, en basalte et sculptée par bouchardage, impressionnante par sa présence et son volume, se distingue par son iconographie rare. Son nez busqué qualifiant son caractère anthropomorphe et les stries entre ses deux crocs pourraient représenter le sang du sacrifice qui s’écoule de la bouche de cette divinité. Aussi le style caractéristique du traitement des yeux en cercles concentriques est comparable, même s’il est ici plus soigné, aux yeux de nombreux monolithes de la culture Recuay, héritière de cette tradition de sculpture en pierre. Culture Chavin, horizon ancien, 900 à 400 avant J.-C., Pérou Pierre (basalte), manques coups et accidents anciens visibles, très belle oxydation et érosion d’ancienneté H. : 33 cm Voir p. 6 et 7 pour un vase en pierre et des exemples de têtes-tenon ornées de crocs dans : Inca -Peru 3000 Ans d’Histoire, S. Purini, Musée Royaux d’Art et d’Histoire, Bruxelles, Ed. Imschoot uitgevers 1990. Provenance : Collection Jean Roudillon avant 1970

Estim. 6 000 - 8 000 EUR