FARRANDO - Importante Collection Lécoules de mobilier XIXe

vendredi 18 mars 2022

Expert : Morgan Blaise

Le 18 mars, la maison Farrando dispersera à l’Hôtel Drouot la seconde partie de la Collection Lécoules. Henry Dasson, Emmanuel Alfred Beurdeley et Charles Sormani se côtoient dans le catalogue, laissant les visiteurs imaginer le goût formidable des antiquaires qui les avaient rassemblés. Les Lécoules étaient des antiquaires parisiens qui ont démarré leur activité en 1905 et qui ont été très actifs entre les années 50 et 90. Ils étaient spécialisés dans l’ameublement et les objets d’art luxueux, avec un attrait particulier pour les créations du milieu et de la fin du XIXe siècle. Ils étaient aussi décorateurs, et ont travaillé pour le Shah d’Iran, aux États- Unis, la côte méditerranéenne, etc. La première partie de la collection avait été dispersée en 2019.

Parmi les œuvres phares de cette seconde vente, figure un secrétaire en cabinet d’Henry DASSON (reçu maître Ébéniste en 1778), surnommé « Cabinet aux Ibis ». Ce meuble est aussi fascinant que mystérieux. Il est estampillé Henry Dasson, ne laissant donc aucun doute quant à l’auteur. Mais il ne figure pas dans les archives des Expositions universelles. Or c’est un meuble très précieux : les bronzes sont d’une qualité remarquable (Dasson avait commencé sa carrière comme horloger – il réalisait les caisses de pendules en bronze), le panneau de laque japonais hiramaki-e et takamaki-e (or et argent à haut relief) est d’époque Edo (1603-1868) et surtout, il est orné de toutes parts : il n’était pas destiné à être accolé à un mur.

Stylistiquement, ce cabinet est à rapprocher de l’Exposition universelle de Chicago, en 1893, où Emmanuel Alfred Beurdeley avait exposé un vase cornet en porcelaine de Chine qu’il avait monté en bronze à décor de deux hérons. Hérons, ibis et panneaux de laque illustrent parfaitement la vague japonisante de la fin du XIXe siècle. Néanmoins, Henry Dasson ne participant pas à l’Exposition de 1893, il s’agit probablement d’un meuble de commande réalisé peu avant sa cessation d’activité en 1894. Le Cabinet aux Ibis est estimé entre 30 000 et 50 000 €.
 
   
 
Installé au 86, rue Saint-Louis, Henry Dasson est cité dans l’Almanach en 1858 comme horloger, signifiant sans doute qu’il fabriquait des caisses de pendules en bronze. En 1871, établi 106, rue Vieille du Temple à Paris, Henry Dasson rachète le fond de l’ébéniste Winckelsen à sa veuve. D’avantage bronzier qu’ébéniste, il s’illustre par la qualité de la ciselure et la dorure de ses ornements en bronze. Il s’y emploie en réalisant de somptueuses copies des plus célèbres meubles royaux, à l’image du bureau à cylindre du roi Louis XV.

Récompensé par une médaille d’or à l’Exposition universelle de 1878, il participe également à l’Exposition des Beaux- Arts appliqués à l’Industrie puis en 1882 à l’Exposition rétrospective de l’Union centrale des Arts décoratifs. Présent à l’Exposition coloniale de 1883 ainsi qu’à l’Exposition universelle de 1889 pour laquelle il reçoit un grand prix artistique, sa dernière participation à une Exposition sera à Moscou en 1891.

Une autre réalisation de Dasson sera présentée au cours de la vente ; la « Table des Arts ». Elle est rectangulaire, reposant sur des pieds en caryatides représentant chacune une allégorie des Arts, en l’occurrence la Musique, la Peinture, La Sculpture et la Poésie. Dasson a réalisé le modèle de cette table en 1880 et l’a présentée à l’Exposition universelle à laquelle il participait cette année-là. Elle fait écho à la table dite « Table des Quatre Saisons » que l’ébéniste avait présenté deux ans plus tôt, à l’Exposition Universelle de 1778.

Signée « DASSON, 1889 », elle est sommée d’un plateau en porphyre d’Égypte et ornée de bronzes ciselés et dorés. Lors de de l’Exposition universelle de 1889 à Paris, le rapport général d’Alfred Picard décrit une petite table pouvant peut-être correspondre au modèle présenté : « M. Dasson dont le crédit universel défie toute concurrence, nous présente une exposition remarquable, dans laquelle les styles Louis XIV, Louis XV et Louis XVI refleurissent avec éclat… nous citerons… sa petite table Louis XVI en vieil acajou, dessus en porphyre, avec quatre pieds formés de fines statuettes en bronze ciselé, etc. ».


Emmanuel Alfred BEURDELEY (1847-1818) dont le nom a déjà été évoqué, compte bien sûr parmi cette importante collection de mobilier et objets d’art du XIXe siècle. Son Œuvre est illustré par une rare paire de candélabres aux autruches. Sept bras de lumières sont supportés par trois autruches représentées debout sur leur socle. La paire de candélabres est estimée entre 10 000 et 15 000 €.

À l’époque où les collectionneurs aisés regrettaient de ne pouvoir acquérir les meubles et objets d’art de provenances royales, la mode d’en faire réaliser des copies s’est développée. À tel point que certains musées, dont celui du Louvre, a ouvert ses portes aux ébénistes, dont Beurdeley, pour qu’ils puissent réaliser des moules en plâtre de décors, ornements et détails.

Ainsi, ce modèle est-il une réplique exacte des candélabres aux autruches exécutés par François Rémond, livrés en 1782 pour le second Cabinet turc du comte d’Artois à Versailles, et aujourd’hui conservés au château de Versailles. Si le nombre précis de candélabres commandés à Beurdeley n’est pas connu, trois autres paires de candélabres aux autruches sont aujourd’hui répertoriées ; celle-ci est la quatrième.
 
   
 
De Beurdeley, qui était également restaurateur, figure également une petite table tricoteuse. En tant que restaurateur, Beurdeley a pris l’habitude de réemployer des éléments anciens et de les incorporer à ses créations contemporaines. Ainsi cette petite table tricoteuse de la fin du XIXe siècle, estampillée « A.BEURDELEY A PARIS » compte 16 petits médaillons en ceinture. De près, on s’aperçoit qu’il s’agit de petits médaillons de cuivre émaillé, par Joseph Coteau (1740- 1801), l’un des émailleurs les plus célèbres de son temps. La petite table est estimée entre 3 000 et 5 000 €.
 
   
 
Enfin, une création pour le moins originale de Paul Charles SORMANI (1817-1866) se distingue. Il s’agit d’un secrétaire à abattant, à décor marqueté de rinceaux fleuris, rehaussé d’une riche ornementation de bronze ciselé et doré. Un plateau de marbre fleur de pêcher surplombe l’ensemble signé sur la serrure de l’abattant « Paul Sormani, 10 rue Charlot Paris ». Ce secrétaire d’apparence classique est en réalité le fruit de l’imagination de Sormani, quand il a réuni deux modèles de secrétaires déjà existants.

L’un est le secrétaire à abattant que Jean-Henri Riesener livra en 1783 à Marie-Antoinette et aujourd’hui conservé au Metropolitan Museum de New York et l’autre est un secrétaire conservé à la Frick Collection. Du premier, le secrétaire estimé entre 8 000 et 10 000 € reprend une partie de l’ornementation en bronze doré, à l’image des chutes en console, du chiffre de Marie-Antoinette en ceinture et des imposants sabots feuillagés. Du second, notre secrétaire emprunte le décor marqueté et le médaillon central en bronze doré.
Un modèle identique fut exposé au Salon des Industries du Mobilier de 1908 et un secrétaire similaire figure dans le catalogue commercial de la maison Krieger, Damon et Colin, L.P.A. Colin et Courcier en 1908.
 

 
Vente aux enchères publique - Hôtel Drouot - Salle 1
Vendredi 18 mars 2022 - 14h

Exposition publique - Hôtel Drouot - Salle 1
Mercredi 16 mars 2022 - 11h/18h
Jeudi 17 mars 2022 - 11h/20h
Vendredi 18 mars 2022 - 11h/12h


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Meubles anciens et de style, objets d'art et d'ameublement

Vente : vendredi 18 mars 2022
Salle 1 - Hôtel Drouot - 9, rue Drouot 75009 Paris, France
Maison de vente
Farrando
Tél. +33 1 42 46 79 01