Null Louis ARAGON (1897-1982). L.A.S. «L.», Lundi soir 4 Décembre [1939], à Elsa…
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Louis ARAGON (1897-1982). L.A.S. «L.», Lundi soir 4 Décembre [1939], à Elsa Triolet; 4pages in-4. Longue lettre amoureuse d’Aragon soldat à Elsa. La nuit, près d’un feu de cheminée, Aragon écrit à Elsa... «Oh je voudrais encore t’avoir contre moi, déjà tu me manques affreusement, déjà ton petit sourire se perd, je ne t’entends plus, je ne peux plus te dire Monku, je ne peux plus toucher le petit nu. Mon aimée, mon aimée, quand sera-t-on encore ensemble? Pourtant je dois te dire que j’ai pris en permission, près de toi, contre toi, de toi, une grande, une énorme provision de courage. Je vais beaucoup mieux, physiquement et moralement, que quand je suis arrivé à Paris l’autre jour. Comme tu dis, je suis presque normal»... Il réclame divers objets... «L’atmosphère ici est meilleure qu’avant mon départ. Assez détendue. Je parle simplement de la popote et des officiers les plus proches. Nous avons été félicités par le général pour nos travaux, il a distribué de l’argent aux meilleurs travailleurs etc.» Il y a des bruits de départ... Aragon raconte la vie quotidienne, les parties de dominos et la causette après dîner... Il parle des chaussettes que lui a envoyées sa mère... «Le manuscrit de la fin du roman [Les voyageurs de l’impériale] repose donc devant moi, à ma droite, sur ma table, et dès demain je me mettrai d’arrache-pied au travail. On est écrivain ou on ne l’est pas, pas vrai?»... Il va écrire à Paulhan et à sa mère... Sa lettre est «interminable»... «je continue à être comme cela encore un peu avec toi. Tu dis, je t’entends d’ici, que je te parle plus quand je ne suis pas avec toi. Ne te moque pas de moi, ma méchante aimée, de moi et de mes grands soucis. Tu sais bien que mes soucis, il y en a 9 sur 10 qui t’ont pour sujet. Tout tourne autour de toi dans cette tête et ce cœur qui t’appartiennent. Tout dans le monde, et tout dans le ciel. Cela me fait penser que j’ai promis trois poèmes. Tu vois ce pain sur la planche! [...] Je vais essayer de m’endormir en cherchant des rimes nouvelles et extraordinaires comme des contes d’Edgar Allan Poe. Quelque part, le nommé Paul Valéry a dit: On peut s’endormir sur n’importe quel mot... Je vais voir s’il a raison. Mais je sais bien que si le mot était Monku, je ne pourrais jamais, jamais m’endormir tout seul. Mon amour que je n’ai pas assez embrassé, mon amour qui me manque tant, mon amour qui m’inquiète, mon petit qui as peut-être mal ce soir... [...] Je t’aime, je t’aime, et je recommence à compter les jours, les nuits, à écouter les bruits dans l’ombre, à penser à la rue de la Sourdière, à tout ce qui t’entoure, et à me ronger. Oh, mon amour, vite, vite que je t’aie dans mes bras!»...

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Louis ARAGON (1897-1982). L.A.S. «L.», Lundi soir 4 Décembre [1939], à Elsa Triolet; 4pages in-4. Longue lettre amoureuse d’Aragon soldat à Elsa. La nuit, près d’un feu de cheminée, Aragon écrit à Elsa... «Oh je voudrais encore t’avoir contre moi, déjà tu me manques affreusement, déjà ton petit sourire se perd, je ne t’entends plus, je ne peux plus te dire Monku, je ne peux plus toucher le petit nu. Mon aimée, mon aimée, quand sera-t-on encore ensemble? Pourtant je dois te dire que j’ai pris en permission, près de toi, contre toi, de toi, une grande, une énorme provision de courage. Je vais beaucoup mieux, physiquement et moralement, que quand je suis arrivé à Paris l’autre jour. Comme tu dis, je suis presque normal»... Il réclame divers objets... «L’atmosphère ici est meilleure qu’avant mon départ. Assez détendue. Je parle simplement de la popote et des officiers les plus proches. Nous avons été félicités par le général pour nos travaux, il a distribué de l’argent aux meilleurs travailleurs etc.» Il y a des bruits de départ... Aragon raconte la vie quotidienne, les parties de dominos et la causette après dîner... Il parle des chaussettes que lui a envoyées sa mère... «Le manuscrit de la fin du roman [Les voyageurs de l’impériale] repose donc devant moi, à ma droite, sur ma table, et dès demain je me mettrai d’arrache-pied au travail. On est écrivain ou on ne l’est pas, pas vrai?»... Il va écrire à Paulhan et à sa mère... Sa lettre est «interminable»... «je continue à être comme cela encore un peu avec toi. Tu dis, je t’entends d’ici, que je te parle plus quand je ne suis pas avec toi. Ne te moque pas de moi, ma méchante aimée, de moi et de mes grands soucis. Tu sais bien que mes soucis, il y en a 9 sur 10 qui t’ont pour sujet. Tout tourne autour de toi dans cette tête et ce cœur qui t’appartiennent. Tout dans le monde, et tout dans le ciel. Cela me fait penser que j’ai promis trois poèmes. Tu vois ce pain sur la planche! [...] Je vais essayer de m’endormir en cherchant des rimes nouvelles et extraordinaires comme des contes d’Edgar Allan Poe. Quelque part, le nommé Paul Valéry a dit: On peut s’endormir sur n’importe quel mot... Je vais voir s’il a raison. Mais je sais bien que si le mot était Monku, je ne pourrais jamais, jamais m’endormir tout seul. Mon amour que je n’ai pas assez embrassé, mon amour qui me manque tant, mon amour qui m’inquiète, mon petit qui as peut-être mal ce soir... [...] Je t’aime, je t’aime, et je recommence à compter les jours, les nuits, à écouter les bruits dans l’ombre, à penser à la rue de la Sourdière, à tout ce qui t’entoure, et à me ronger. Oh, mon amour, vite, vite que je t’aie dans mes bras!»...

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