FRAYSSE & ASSOCIÉS - BINOCHE ET GIQUELLO - Succession de Madame M. Binoche
mercredi 19 juin 2019Experts : Cabinet Brame & Lorenceau, C2L Expertises Carl de Lencquesaing, Alexandre Chevalier, SAS Dechaux-Stetten & Associés, Alexandre Lacroix et associés, Amélie Marcilhac, Nicole de Pazzis-Chevalier, Portier & Associés Alice Jossaume, Cabinet Turquin
Le 19 juin, les maisons de ventes Fraysse & Associés et Binoche et Giquello disperseront à quatre mains le contenu de la collection de Madame Michel Binoche. Principalement constituée de tableaux, objets d’art et meubles classiques, la collection est néanmoins ponctuée de pièces d’art d’Asie, de bijoux et d’objets de vitrine.
L’œuvre phare de la vente est Fleurs coupées dans un Römer posé sur un entablement sur fond de paysage peinte par Ambrosius BOSSCHAERT le Vieux (Anvers 1573 - La Haye 1621) sur panneau de chêne.
La découverte de ce panneau inédit constitue un apport majeur au corpus de l’artiste, dont seulement une soixantaine de tableaux, représentant des bouquets dans un vase, est connue. Seulement sept d’entre eux, et celui-ci, se distinguent par un arrière-plan avec un paysage atmosphérique au lieu du fond noir traditionnel. Caractérisés par leur grande variété botanique et une finesse picturale virtuose, admirés pour la vivacité de leurs couleurs, ces derniers appartiennent à la dernière période de l’artiste, entre 1619 et 1621.
Six de ces bouquets sont situés dans une fenêtre ouverte, sous une arche en plein cintre. Le septième, jusqu’alors le seul tableau répertorié de Bosschaert représentant un vase sur un entablement devant un ciel ouvert, est conservé au County Museum de Los Angeles. Sa composition florale, l’arrangement du bouquet et le vase römer sont identiques au tableau de cette vente. En revanche, celui-ci ne possède qu’un seul insecte : un papillon.
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Ambrosius BOSSCHAERT le Vieux (1573-1621) Fleurs coupées dans un Römer posé sur un entablement sur fond de paysage Panneau de chêne, une planche, non parqueté 29,2 x 19,4 cm Monogrammé en bas à gauche AB Etiquette ancienne au dos : Brueghel de velours Estimation : sur demande Provenance : Acquis dans les années 1890 par Monsieur Marc à l’Hôtel Drouot comme Brueghel de velours (étiquette au dos ) ; Resté dans sa famille chez maître André Benoist (mort en 1969) ; Resté depuis chez les descendants de ce dernier. | 1. Iris jaune - Iris pseudacorus 2. Tulipe rouge - Tulipa hybrida 3. Adonis d’automne - Adonis annua 4. Rose de Provins - Rosa provincialis 5. Ancolie commune - Aquilegia caerulea 6. Tulipe rouge et blanche - Tulipa hybrida 7. Santoline petit-cyprès - Santolina chamaecyparissus 8. Pivoine - Paeonia 9. Dahlia - Dahlia 10. Myosotis des Alpes - Myosotis alpestris 11. Muguet - Convallaria majalis 12. Fritillaire pintade - Fritillaria meleagris 13. Cyclamen - Cyclamen persicum 14. OEillet d’Inde - Tagetes patula |
À l’instar des autres natures mortes de cette période, les bouquets de Bosschaert le Vieux sont constitués de fleurs de différentes saisons. Le naturalisme des détails donne une valeur symbolique ou religieuse à chaque élément. Le papillon, animal éphémère par excellence, fait référence à la fragilité de notre existence, comme les fleurs, belles seulement quelques instants. L’iris jaune (1.) se hisse et domine les tulipes (2. et 6.), dont les bulbes sont des objets de collection qui font la fierté et la fortune des Pays-Bas. Sa forme évoque le glaive qui transperça la Vierge et dont l’amour universel est aussi suggéré par la rose sans épine (4.). Le muguet (11.), par son parfum délicat et son mouvement incliné de dévotion, dit l’humilité de Marie. L’ancolie (5.) évoque les sept dons du Saint Esprit. Le cyclamen (13.) est aussi une fleur mariale. Le myosotis (10.), fleur du paradis, rappelle le salut de l’âme qui reste fidèle à Dieu ; l’œillet (14.), la Passion du Christ.
La description réaliste de la nature contraste avec le second plan. Le dégradé bleuté crée un paysage poétique, faisant écho au lien entre le microcosme et le macrocosme, entre les choses simples quotidiennes et l’immensité de l’Univers et du divin.
Ambrosius Bosschaert est redécouvert au XXe siècle grâce aux travaux de Laurent J. Bol. Né dans le milieu protestant anversois, il quitte sa ville natale pour échapper aux troubles religieux. Il s’installe avec sa famille plus au Nord, à Middelbourg, où il devient membre de la Guilde de Saint-Luc en 1594. Plus tard, il s’installe à Bergen-op-Zoom, puis à Utrecht en 1615 et à Breda en 1619. Il meurt à La Haye en 1621 au moment où il travaillait à un tableau de fleurs commandé par le prince d’Orange, Maurice de Nassau. Ses trois fils poursuivirent son style. Son beau-frère, Balthasar van der Ast (1593/4-1657), a imité dans sa jeunesse ce type de composition, sur fond de paysage, mais sans parvenir au même raffinement.
